Travaux portant sur un ouvrage neuf dans un bâtiment existant et couverture assurantielle : à quoi faut-il veiller ?
Pour des travaux concernés…
Un arrêt à prendre en compte… Comme expliqué dans un conseil («Réalisation d’un ouvrage neuf sur un ouvrage existant : les désordres après réception sur l’existant sont-ils assurés ?» Juillet 2024) , la Cour de cassation a rendu le 30‑5‑2024 un important arrêt sur la couverture assurantielle en cas de désordres subis par un ouvrage existant, lorsqu’ils sont provoqués par la construction d’un ouvrage neuf (Cass. 3e civ.30‑5‑2024 n° 22-20711) .
Pour certains travaux… L’arrêt du 30‑5‑2024 concerne tous les travaux de construction (ou assimilés) réalisés sur/dans un immeuble existant et constitutifs d’un «ouvrage», au sens de l’article 1792 du Code civil et de la jurisprudence.
En pratique ? Au vu de la jurisprudence, l’arrêt du 30‑5‑2024 peut notamment concerner une «rénovation lourde assimilable à des travaux de construction»(Cass. 3e civ. 29‑1‑2003 n° 01-13034) , des travaux d’extension ou de surélévation, ou de remplacement de la couverture d’une maison, ou encore des travaux de modification d’une charpente (Cass. 3e civ. 25‑6‑2020 n° 19-15153). Il a été jugé que des travaux de ravalement de façade d’un immeuble, s’ils ont une fonction d’étanchéité ou d’imperméabilisation, peuvent participer «de la réalisation d’un ouvrage au sens de l’article 1792 du Code civil»(Cass. 3e civ. 16‑2‑2022 n° 20-20988 ; Cass. 3e civ. 4‑4‑2013 n° 11-25198 et 13‑2‑2020 n° 19-10249) . On peut penser que peut aussi être concernée l’installation de modules photovoltaïques intégrés en toiture d’un bâtiment résidentiel existant. Au contraire, et pour seul ex., des travaux de peinture ne sont pas concernés (Cass. 3e civ. 16‑5‑2001 n° 99-15062) . Il en a été jugé de même pour des travaux de «modeste importance, sans incorporation de matériaux nouveaux» à l’ouvrage existant (Cass. 3e civ. 28‑2‑2018 n° 17-13478) .
… gare à la couverture assurantielle
Si l’assurance RCD reste obligatoire… Un entrepreneur reste tenu de souscrire une assurance en RCD s’il réalise des travaux concernés, constitutifs d’un ouvrage, dans un immeuble existant. Rappelons qu’il en va autrement, à la suite d’un revirement de jurisprudence, en cas d’installation par adjonction/remplacement d’un élément d’équipement non constitutif d’un ouvrage(Cass. 3e civ. 21‑3‑2024 n° 22-18694) . L’assurance RCD n’est plus obligatoire pour ce type de travaux («Désordres liés à des éléments d’équipements installés sur un ouvrage existant : un «revirement» de jurisprudence !» Mai 2024) .
La couverture est limitée… L’arrêt du 30‑5‑2024 a pour effet de limiter la couverture assurantielle RCD en cas de désordres subis après réception par le bâtiment existant. En cas de sinistre, pour espérer être «couvert» par son assureur RCD, un entrepreneur doit démontrer que les (deux) conditions cumulatives , posées par l’arrêt, sont réunies : indivisibilité technique des ouvrages (neuf/existant) et incorporation totale de l’ouvrage existant dans le neuf. Cela sera pas chose simple, en pratique. Pour des travaux de ravalement de façade, il a déjà été jugé qu’un «enduit de façade n’est pas techniquement indivisible de l’ouvrage existant sur lequel il est posé»(Cass. 3e civ. 16‑2‑2022 n° 20-20988) .
En pratique ? Un entrepreneur sera bien avisé de souscrire une assurance complémentaire (garantie facultative en RC, donc avec plafond et franchise) pour «couvrir» d’éventuels dommages subis par l’immeuble existant du fait de ses travaux. Un maître d’ouvrage sera aussi bien avisé de souscrire pareille garantie, dans le cadre de son assurance DO. Tout assureur DO est censé proposer la garantie, conformément à une convention FFSA/État régularisée en 2005.