CONGÉS PAYÉS - MALADIE - 28.05.2024

Retour sur les congés payés

À l’heure où nous imprimons, l’administration n’a encore fourni aucune précision officielle sur la loi cp, alors qu’elle génère de nombreuses questions d’application. Nous revenons ici en premier lieu sur le droit 2023/2024 et proposons quelques suggestions pratiques.

Retour sur le calcul du droit 2023/2024

Pour le calcul des cp de la période d’acquisition 1‑6‑2023/31‑5‑2024, nous avons considéré dans ACP que, le droit à cp total se calculant à la fin de la période de référence au 31‑5‑2024, la loi entrée en vigueur le 24‑4‑2024 était applicable à toute la période d’acquisition, avec un droit à cp de 2 j. ouvrables/mois de maladie inclus dans cette période (ACP 5/24 « Calcul du droit à cp : les nouvelles règles ») .

Cependant, une interprétation littérale du texte peut aboutir à considérer que les arrêts maladie ne donnent droit à 2 j. de cp de façon automatique qu’à compter du 24‑4‑2024, avec les conséquences suivantes :

  • les arrêts maladie inclus dans la période 1‑6‑2023/23‑4‑2024 ne génèrent alors des cp qu’au titre de la rétroactivité de la loi ;
  • ces cp devraient alors être réclamés par le salarié jusqu’au 23‑4‑2026 au plus tard et ne lui seraient accordés que s’il n’a pas déjà obtenu 24 j. ouvrables au titre de la période 1‑6‑2023/31‑5‑2024, et en tout état de cause, à concurrence de 24 j. au total.

En pratique. Cette dernière position limite nettement le droit à cp « direct » des salariés en maladie entre le 1‑6‑2023 et le 23‑4‑2024. On peut toutefois noter que l’application de la règle de rétroactivité aboutit aussi à ce que, dans l’entreprise, pour les cp acquis sur la période d’acquisition qui vient tout juste de se terminer, le même droit de 24 j. ouvrables sera accordé :

  • aux salariés malades durant toute la période de référence et qui n’ont pas du tout travaillé (2 j./mois sur 12 mois) ;
  • mais aussi aux salariés qui n’ont été absents que 2,5 mois avant le 23‑4‑2024 et ont travaillé 9,5 mois avec obtention de 9,5 × 2,5 j. = 23,75 j. arrondis à 24 j., pour lesquels l’application de la rétroactivité ne génère pas de droit supplémentaire ;
  • avec possiblement des incompréhensions et tensions de la part des salariés concernés, pouvant influer sur l’ambiance dans l’entreprise.

Gérer les arrêts en cours

Salariés qui ont repris en mai. En juin 2024, vous devez penser à informer tous les salariés qui ont repris en mai 2024 d’un arrêt maladie ou AT/MP (application du délai d’1 mois maxi) :

  • de leur solde de cp acquis sur la période 1‑6‑2022/31‑5‑2023 qu’ils n’ont pas pu prendre avant fin avril (ou mai) 2024 du fait de leur arrêt, et de la limite pour les prendre (date d’information + 15 mois) ;
  • des cp acquis sur la période 1‑6‑2023/31‑5‑2024, à prendre en principe jusqu’au 30‑4‑2025 (ou 31-5) : puisqu’ils ont repris, ils disposent en effet de la période normale de prise de ces cp.

Attention ! Les points suivants sont à relever :

  • si le salarié était déjà en arrêt sur la période d’acquisition 1‑6‑2022/31‑5‑2023 mais avait acquis au moins 24 j., il n’a pas droit à un supplément de cp sur la maladie ;
  • sinon, il pourra lancer une action pour réclamer un complément à concurrence de ces 24 j. jusqu’au 23‑4‑2026 ;
  • cette action pourra aussi être lancée pour les cp 2023/2024 qui auraient été calculés en retenant l’interprétation littérale d’assimilation des seules périodes d’arrêt maladie postérieures au 23‑4‑2024, en cas de droit global inférieur à 24 j.

Salariés en arrêt maladie/AT/MP. Dès leur reprise, vous devrez les informer :

  • du solde de cp acquis du 1‑6‑2022 au 31‑5‑2023 qu’ils n’ont pas pu prendre avant fin avril (ou mai) 2024 du fait de leur arrêt, et de leur date limite de prise : date de l’information + 15 mois, ou, s’ils sont absents au moins depuis le 1‑6‑2022, jusqu’au 31‑8‑2024 (1‑6‑2023 + 15 mois) ;
  • des cp acquis du 1‑6‑2023 au 31‑5‑2024, à prendre en principe jusqu’à fin avril 2025 (ou mai), s’ils reprennent assez tôt pour les prendre.

En pratique. Tant que le salarié ne reprend pas, vous n’avez pas d’information à lui fournir :

  • s’il est absent depuis le 1‑6‑2022 et ne reprend pas avant le 31‑8‑2024, il perdra le solde de cp 2022/2023 ;
  • s’il ne reprend pas avant le 31‑8‑2025, il perdra aussi les cp 2023/2024 (report du 1‑6‑2024 + 15 mois).

Indemnisation des cp de l’été

Les cp qui vont être pris cet été auront pu être acquis sur du travail effectif, ou en partie sur de la maladie. Dans la majorité des cas, sans changement, ils seront payés au maintien de salaire, avec comparaison avec le 1/10 à la prise des derniers cp. C’est à ce moment-là que l’employeur devra prendre en compte seulement 80 % de la rémunération théorique des absences maladie dans la base du 1/10, sachant que, sauf nombreuses h sup non structurelles sur les périodes travaillées, il y a de fortes chances que le maintien soit plus favorable.

Conseil. Aucune précision n’est fournie sur la rémunération à retenir. Il nous semblerait logique de prendre 80 % du montant de la retenue pour absence qui a été pratiquée, ainsi que des éventuels éléments de rémunération du mois non affectés par l’absence et pris en compte dans l’indemnité de cp.

Maladie pendant les cp

À ce jour, la règle couramment appliquée est que le salarié qui tombe malade pendant ses cp reste en cp, mais peut percevoir les IJSS en plus de son salaire.

Alors que cette règle ne correspond pas à la jurisprudence européenne, selon laquelle le salarié malade pendant ses cp ne doit pas les perdre, la loi sur le cp n’a pas traité ce cas. Face au risque d’un revirement de la jurisprudence française, il peut être prudent d’envisager alors d’interrompre les cp lorsque survient la maladie, et d’en reporter le solde. Il serait alors logique que le salarié, se retrouvant dans le cas d’impossibilité de prendre ses cp du fait de maladie/AT/MP, se voie appliquer les nouvelles règles de report.

Évaluer les cp « rétroactifs »

Principe. Les cp acquis sur les périodes de maladie antérieures et non perdus du fait du report (ACP 5/24 « Loi cp : appliquer la rétroactivité aux salariés en poste ») faisant l’objet d’une demande des salariés seront à prendre par les salariés en poste, et à payer à ceux sortis.

Il peut donc être nécessaire de valoriser l’indemnité correspondante : pour cela, il faut en principe comparer le maintien de salaire et le 1/10. Ce calcul peut s’avérer compliqué si le salarié avait acquis une part de cp sur du travail et a droit à un complément lié à la maladie, avec application de la règle de plafonnement du droit total à 24 j. en cas d’application de la rétroactivité de la loi.

Maladie durant toute la période de référence. Le salarié qui a été malade pendant la totalité de la période d’acquisition aura alors acquis 24 j. rétroactivement :

  • le 1/10 correspondant sera calculé sur 80 % de la rémunération théorique de l’absence et des éléments qu’elle n’a pas affectés ;
  • le maintien se calculera selon le salaire et le nombre de j. ouvrables du mois où les cp seront pris par les salariés en poste, ou du mois de départ des salariés sortis.

Plafonnement du droit global à 24 j. Dans ce cas, le calcul du 1/10 est plus complexe, mais peut être utile notamment en cas de nombreuses h sup non structurelles effectuées sur les périodes travaillées.

À notre avis, sous réserve de précisions ultérieures, pour les cp « rétroactifs » de 2009 à la loi, la base du 1/10 pourrait alors être : (rémunération des périodes travaillées) + [(rémunération théorique des périodes de maladie × 80 %)/j. théoriques acquis sur les périodes de maladie × j. à payer après plafonnement à 24 j.].

Exemple 1. Droit initial calculé sans prise en compte des périodes de maladie sur 7 mois de travail × 2,5 j. = 17,5 j. arrondis à 18 j. qui n’ont pu être pris du fait de la maladie. Avec application rétroactive de la loi, l’absence de 5 mois aurait dû donner lieu à 5 × 2 j. = 10 j. Mais, le droit total étant limité à 24 j., le supplément de cp auquel il a droit est de 24 j. - 18 j. déjà acquis à l’époque = 6 j. supplémentaires, et non 10 j. Sur l’hypothèse d’un salaire mensuel de 3 000 €, la base du 1/10 se calculerait alors ainsi :

  • 7 mois travaillés × 3 000 € = 21 000 € correspondant aux 18 j. qui avaient été acquis sur les périodes travaillées ;
  • (5 mois de maladie × 3 000 € × 80 %) = 12 000 € correspondant aux 10 j. théoriques acquis avec la loi. Mais, comme ces 10 j. théoriques sont réduits à 6 j. du fait du plafonnement à 24 j., il faut à notre avis le limiter à 12 000 €/10 j. théoriques × 6 j. réellement dus = 7 200 € ;
  • soit un total de (21 000 € + 7 200 € = 28 200 €)/10 = 2 820 € pour les 24 j. de cp (18 j. non pris calculés sur la période travaillée, et 6 j. supplémentaires accordés rétroactivement sur la période de maladie).

Exemple 2. Avec les mêmes données, s’il s’agit d’un salarié qui a quitté l’entreprise et à qui l’indemnité compensatrice des 18 j. avait été payée :

  • elle l’a en principe été au 1/10 pour 2 100 € (21 000 €/10), supérieur au maintien (3 000 €/26 j. ouvrables du mois de sortie par hyp. × 18 = 2 076,92 €) ;
  • reste donc à lui verser : 2 820 € - 2 100 € = 720 €.

À savoir. La loi cp s’applique aussi aux CDD/intérimaires, avec des conséquences importantes (ACP 6/24 « CDD et congés : concernés aussi ! ») .

De nombreuses conséquences pratiques de la loi restent encore très incertaines : nous proposons quelques pistes de réflexion, dans l’attente de précisions administratives et des premières jurisprudences qui interviendront.

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