SOCIÉTÉ - RELATIONS INTERENTREPRISES - 18.09.2024

Votre société sanctionnée pour des infractions commises par la société qu’elle a absorbée ?

À la suite d’une opération de fusion-absorption, votre société absorbe une autre société, cette dernière étant ainsi dissoute. Pourrait-elle toutefois être reconnue coupable pour des faits que l’absorbée aurait commis avant cette opération ? Réponse du juge.

Les faits

Une SARL est condamnée, en juin 2021, pour plusieurs infractions au droit de l’urbanisme commises en 2015, en lien avec l’exploitation d’un camping. À la suite d’une opération de fusion-absorption en septembre 2022, elle est dissoute.

La société absorbante, également une SARL, est alors rendue coupable des faits commis en 2015 par la société absorbée, avant l’opération de fusion-absorption, ce qu’elle conteste.

La décision

Le juge rappelle que, aux termes de l’article 121-1 du Code pénal, nul n’est responsable pénalement que de son propre fait. Selon l’article L 236-3 du Code de commerce, applicable aux SARL, la fusion-absorption, si elle emporte la dissolution de la société absorbée, n’entraîne pas sa liquidation, de même que le patrimoine de la société absorbée est universellement transmis à la société absorbante et les associés de la première deviennent associés de la seconde. En application de l’article L 224-1 du Code du travail, tous les contrats de travail en cours au jour de l’opération se poursuivent entre la société absorbante et le personnel de l’entreprise.

Il ajoute qu’il résulte de ces dispositions que l’activité économique exercée dans le cadre de la société absorbée, qui constitue la réalisation de son objet social, se poursuit dans le cadre de la société qui a bénéficié de cette opération et que, de cette façon, la continuité économique et fonctionnelle de la personne morale conduit à ne pas considérer la société absorbante comme étant distincte de la société absorbée, permettant que la première soit condamnée pénalement pour des faits constitutifs d’une infraction commise par la seconde avant l’opération de fusion-absorption.

Il décide donc en l’espèce que la société absorbante peut en effet être condamnée pénalement à une peine d’amende ou de confiscation pour des faits constitutifs d’une infraction commise par la société absorbée avant l’opération (Cass. crim. 22‑5‑2024 n° 23-83.180) .

Un transfert de la responsabilité pénale à la société absorbante

Une solution déjà applicable aux SA… La Cour de cassation a déjà jugé que, en cas d’opération de fusion-absorption entrant dans le champ de la directive européenne « fusion » (dir. UE 2017/1132 du 14‑6‑2017 relative à la fusion des sociétés anonymes) , la société absorbante peut être condamnée à une peine d’amende ou de confiscation pour une infraction commise par l’absorbée avant l’opération (Cass. crim. 25‑11‑2020 n° 18-86.955) .

… étendue aux SARL sans restriction de temps. En 2020, la Cour avait exclu que sa nouvelle doctrine, qui constituait un revirement de jurisprudence, puisse s’appliquer aux fusions conclues avant le 25‑11‑2020. Dans l’arrêt commenté, au contraire, la Cour ne pose aucune restriction temporelle à l’application du principe posé. L’autre point notable sur lequel la Cour de cassation revient par ce nouvel arrêt porte sur le champ d’application du transfert de la responsabilité pénale de l’absorbée à l’absorbante, qui, contrairement à ce que l’on avait pu croire, n’est pas limité aux sociétés entrant dans le champ de la directive « fusion », à savoir les SA, mais concerne aussi les SARL.

Il est jugé, comme pour les SA, qu’une SARL qui en a absorbé une autre à l’occasion d’une fusion peut être condamnée à une peine d’amende ou de confiscation pour des faits constitutifs d’une infraction commise avant la fusion par la société absorbée.

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