COMMERCE - FOURNISSEURS - 12.09.2024

Résolution du contrat aux torts partagés des parties : une possible restitution de l’acompte ?

Votre société commande une prestation. Le prestataire ne s’exécutant pas, vous lui notifiez la résolution du contrat et lui demandez la restitution de l’acompte versé ainsi que des dommages et intérêts. Il refuse, alléguant que l’inexécution du contrat est aussi due de votre fait. Pouvez-vous alors obtenir gain de cause ? Un cas jugé récemment.

Les faits

Une société, ayant une activité dans le domaine de la comptabilité, demande en 2018 à un prestataire de lui fournir une plateforme technologique et des prestations informatiques associées.

Cette société, après plusieurs reports de la mise en service de la plateforme, notifie la résolution du contrat, sollicite la restitution des sommes qu’elle a déjà versées au prestataire (62 000 € environ) et lui réclame des dommages et intérêts.

La décision

La Cour d’appel de Versaille s prononce la résolution du contrat aux torts partagés de la société et du prestataire et écarte en conséquence toute restitution et indemnisation.

La Cour de cassation censure cette décision. D’une part, l’admission de torts partagés ne fait pas obstacle aux restitutions. En effet, la résolution met fin au contrat et, lorsque les prestations échangées ne pouvaient trouver leur utilité que par l’exécution complète du contrat résolu, les parties doivent restituer l’intégralité de ce qu’elles se sont procuré l’une à l’autre (C. civ. art. 1229, al. 1eret 3) . D’autre part, la Cour d’appel avait écarté tous dommages et intérêts sans rechercher la part de responsabilité incombant à chacune des parties dans la résolution du contrat eu égard à la gravité des fautes retenues ni l’importance du préjudice subi par chacune (Cass. com. 15‑5‑2024 n° 23-13.990) .

Conséquences de la résolution d’un contrat aux torts partagés

Les cas de résolution d’un contrat aux torts partagés des parties sont fréquents, notamment en matière de contrats de prestations informatiques où le client peut avoir l’obligation de collaborer activement avec le prestataire. L’affaire est l’occasion pour la Cour de cassation de rappeler deux conséquences de la résolution en cas de fautes commises par les deux parties.

S’agissant des restitutions. En premier lieu, les restitutions, qui sont une conséquence de la résolution du contrat et visent à effacer les effets de l’acte résolu, sont indépendantes des éventuels manquements commis par le créancier de la restitution. La solution ici retenue par la Cour de cassation vaut pour la résolution de tout contrat à « utilité globale », dans lequel les prestations échangées ne pouvaient trouver leur utilité que par l’exécution complète du contrat résolu. En revanche, si les prestations échangées ont trouvé leur utilité au fur et à mesure de l’exécution réciproque, les restitutions sont exclues, sauf pour les prestations n’ayant pas reçu leur contrepartie, et la résolution est alors qualifiée de résiliation (C. civ. art. 1229, al. 3) .

S’agissant des dommages et intérêts. En second lieu, la résolution aux torts partagés ne fait pas non plus obstacle à l’allocation de dommages et intérêts. La Haute Juridiction rappelle ici le principe et l’office du juge en la matière. Il doit déterminer le préjudice subi par chaque partie (ou constater qu’aucun préjudice n’est établi), puis apprécier la part de responsabilité de chacune dans la rupture en fonction de leurs fautes respectives (50/50, 80/20, etc.) et appliquer ce pourcentage au préjudice de chacune, avant de prononcer une éventuelle compensation. Cette dernière est totale, et il n’y a donc pas lieu à indemnisation, seulement si les créances réciproques de dommages et intérêts, après partage de responsabilité, sont d’égal montant.

Le juge rappelle que le fait que la résolution d’un contrat ait été prononcée en raison des fautes commises par les deux parties n’interdit ni les restitutions réciproques ni l’indemnisation des préjudices subis.

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