BAIL COMMERCIAL - CESSION - 18.09.2024

Résiliation d’un bail commercial en raison d’une cession de bail irrégulière : quelles conséquences pour le cessionnaire ?

Un bailleur est contraint de faire résilier le bail commercial d’un locataire, car celui-ci a cédé son droit au bail de manière irrégulière. Quelles sont les conséquences de la résiliation dans les rapports entre le cédant et le cessionnaire ? Un arrêt mérite l’attention…

Où le cessionnaire doit sa garantie…

En cas de résiliation du bail… Nous supposons ici qu’un bailleur a pu, à bon droit, demander et obtenir (Mémento) la résiliation d’un bail commercial, en raison d’une cession irrégulière du droit au bail par le locataire (cédant), à un tiers (cessionnaire). Rappelons que toute clause d’un bail visant à interdire au locataire de céder son bail à l’acquéreur de son fonds de commerce (ou entreprise), ou au bénéficiaire du transfert universel de son patrimoine professionnel, est illicite (C. com. art. L 145-16, al. 1er) .

Résiliation = garantie due par le cédant. Le Code civil prévoit une garantie légale d’éviction du vendeur, en cas de vente (C. civ. art. 1626 et s.) . À ce titre, il a été jugé que «le cédant d’un droit au bail est tenu de garantir sur le fondement de l’article 1630 du Code civil le cessionnaire de l’éviction du bail qu’il souffre du fait que le bailleur lui dénie la qualité de locataire en raison de l’inopposabilité de la cession»(Cass. civ. 4‑7‑2024 n° 23-13822) . Le cessionnaire peut à ce titre réclamer réparation au cédant, au titre de ses préjudices indemnisables. La garantie joue alors même que le cessionnaire avait «connaissance, à la date de son engagement, du risque d’éviction auquel il pouvait être exposé»(Cass. 3e civ. 24‑6‑1998 n° 96-19042) .

La nuance. Au vu d’un arrêt, une clause expresse de non-garantie peut être prévue dans un acte de cession, p.ex. une clause prévoyant que le cessionnaire achète «à ses risques et périls» (arrêt 96-19042 précité) . Cela suppose que le cessionnaire accepte cette clause… Le rédacteur d’un acte de cession sera bien avisé d’informer le cessionnaire sur la teneur et la portée d’une clause de non-garantie (cf. Cass. 3e civ. 6‑6‑2012 n° 11-14032) .

Retrouvez les précisions, exemples et commentaires du Mémento Gestion immobilière sur https://www.alertesetconseils.fr , Annexes, année 20, n° 13.

… la garantie doit jouer à plein !

Affaire vécue. Dans une affaire, à la demande du bailleur, les juges prononcent la résiliation du bail d’un locataire, à ses torts exclusifs, en raison de l’irrégularité de la cession de son bail (faute d’avoir régularisé la cession dans un acte authentique signifié au bailleur). Le locataire (cédant) est condamné à payer au bailleur des loyers et indemnités d’occupation. Après avoir quitté les lieux, le cessionnaire réclame au cédant une indemnisation sur le fondement de la garantie d’éviction. À titre reconventionnel, le cédant demande alors le remboursement des loyers et indemnités d’occupation, payés au bailleur, sur la période partant de la date de l’acte de cession, jusqu’au départ de l’interessé. À bon droit ?

La décision. La Cour de cassation a approuvé le rejet de la demande du cédant, au vu de la règle (inédite) suivante : lorsque le cédant doit la garantie d’éviction, il «ne peut obtenir du cessionnaire évincé le remboursement des loyers et indemnités d’occupation qu’il a payés au bailleur pour la période où le cessionnaire a occupé sans faute les locaux»(Cass. 3e civ. 4‑7‑2024 n° 23-13822 et CA Pau 25‑10‑2022 RG 20/01475 Portalis DBVV-V-B7E-HST5) . En l’espèce, la Cour de cassation a relevé que la société cédante était «seule et entièrement responsable» de l’éviction du cessionnaire, et qu’elle devait l’en garantir. Le cessionnaire avait en outre libéré les locaux quelques jours après la signification de la décision de justice prononçant la résiliation du bail. La demande de remboursement devait donc être rejetée.

Conseil. Au vu de l’arrêt, la règle posée joue si aucune faute ne peut être reprochée au cessionnaire. Il pourrait en être autrement si le cessionnaire tarde p.ex. à libérer les locaux.

Notice sur https://www.alertesetconseils.fr , Annexes, année 20, n° 13.

En cas de résiliation d’un bail commercial en raison d’une cession irrégulière, le locataire (cédant) est en principe tenu d’une garantie d’éviction à l’égard du cessionnaire. Le cédant ne peut alors réclamer au cessionnaire de lui rembourser des loyers payés au bailleur pour la période où l’intéressé a occupé sans faute les locaux loués.

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