FISCALITÉ IMMOBILIÈRE - TVA - 18.09.2024

Régime de la TVA sur marge : où en est-on en cas de revente de terrains/parcelles ?

Des opérateurs (aménageurs, marchands de biens, etc.) nous interrogent sur la possibilité de bénéficier ou non du régime de la TVA sur marge en cas de revente de terrains ou de parcelles détachées du terrain d’assiette d’un bien acheté avec un bâtiment. Le point.

Régime «TVA sur marge» : en général

TVA sur marge : en bref. Sous conditions, un texte fiscal organise des règles de calcul dérogatoires en matière de TVA pour des ventes de terrains à bâtir (TAB), achetés en vue de leur revente par un opérateur assujetti à la TVA, sans droit à déduction (CGI art. 268) . Il a été jugé que, au vu du droit européen, ce régime fiscal, appelé «TVA sur marge», suppose «une identité juridique entre le bien acquis et le bien revendu» . Le droit européen ne fait pas obstacle à ce que le régime puisse s’appliquer pour des TAB ayant fait l’objet, entre le moment de leur achat et celui de leur revente, de modifications de leurs caractéristiques telles qu’une division en lots (CJUE ord. C-191/21 du 10‑2‑2022) .

Ce qu’il faut prendre en compte. Au vu d’un arrêt de la CJUE, le Conseil d’État a jugé que le régime de TVA sur marge peut s’appliquer pour des ventes de TAB si leur achat a été soumis à la TVA sans que l’opérateur ait eu le droit de déduire la taxe, ou si leur achat n’a pas été soumis à la TVA alors que le prix «incorpore un montant de TVA qui a été acquitté en amont par le vendeur initial»  – TVA dite «rémanente». En dehors de ces hypothèses, le régime ne s’applique pas pour des ventes de TAB dont l’acquisition initiale n’a pas été soumise à la TVA, soit qu’elle se trouve en dehors de son champ d’application, soit qu’elle s’en trouve exonérée (CE 12‑5‑2022 n° 416727 ; CJUE 30‑9‑2021 C-299-20) . Dans une affaire, le Conseil d’État a écarté le régime de TVA sur marge pour une revente d’un TAB acheté à un particulier, car il n’était pas justifié que le prix d’achat ait «incorporé un montant de taxe acquittée en amont» par le vendeur initial (CE 18‑4‑2023 n° 468094 et sur renvoi : CAA Lyon 1‑2‑2024 23LY01316) . Des juges du fond ont aussi écarté le régime de la TVA sur marge pour cette raison (CAA Marseille 11‑7‑2024, trois arrêts dont n° 22MA02124 ; CAA Bordeaux 26‑3‑2024 n° 22BX01071) .

Retrouvez les précisions, exemples et commentaires du Mémento Gestion immobilière sur https://www.alertesetconseils.fr , Annexes, année 20, n° 13.

Pour un bien acheté avec un bâtiment

Ce qu’il faut prendre en compte. Selon un principe constant, le Conseil d’État juge que le régime de la TVA sur marge ne s’applique pas en cas de vente de TAB «qui, lors de leur acquisition, avaient le caractère d’un terrain bâti, notamment quand le bâtiment qui y était édifié a fait l’objet d’une démolition de la part de l’acheteur-revendeur ou quand le bien acquis a fait l’objet d’une division parcellaire en vue d’en céder séparément des parties ne constituant pas le terrain d’assiette du bâtiment»(CE 11‑10‑2022 n° 464561) . Ce principe est appliqué à la lettre par des juges du fond (ex. : CAA Bordeaux 25‑6‑2024 n° 22BX02641 ; CAA Versailles 7‑5‑2024 n° 22VE00906) .

Précision récente. Le Conseil d’État a précisé que le régime de la TVA sur marge ne s’applique pas quand des parcelles , «quoique ayant déjà fait l’objet d’une autorisation de division, ou d’une division effective, lors de l’acquisition, avaient, au regard des indications figurant dans l’acte de vente, été vendues non comme terrain à bâtir, mais comme terrain bâti, ensemble avec la parcelle sur laquelle était édifié un bâtiment»(CE 2‑4‑2024 n° 466644) . Cette jurisprudence a déjà été reprise à l’identique par des juges pour valider des redressements fiscaux (CAA Marseille 20‑6‑2024 n° 23MA00262 ; CAA Lyon 4‑7‑2024, trois arrêts dont n° 23LY00242) . En pratique, cette jurisprudence invite à la plus grande rigueur pour rédiger des actes de vente concernés, notamment pour identifier les parcelles issues de la division et «ventiler» le prix de vente (CAA Bordeaux 25‑6‑2024 n° 22BX02641) .

Conseil. Tant qu’elle n’est pas actualisée, un opérateur peut (tenter de) se prévaloir de la doctrine fiscale actuelle, afin d’opposer la garantie prévue par l’article L 80 A du Livre des procédures fiscales, au vu d’une réponse ministérielle publiée en 2022 (rép. min. n° 42986 du 1‑2‑2022 JOAN p. 702) .

Notice sur https://www.alertesetconseils.fr , Annexes, année 20, n° 13.

Au vu de décisions de la CJUE, le Conseil d’État et des juges fixent des critères très restrictifs et des conditions à respecter pour l’admission du régime de la TVA sur marge, côté opérateurs. Au vu d’une réponse ministérielle, il reste possible de se prévaloir de la doctrine fiscale actuelle, tant qu’elle n’est pas mise à jour.

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