FAMILLE & TRANSMISSION - 05.09.2024

La renonciation à la qualité d’associé par le conjoint n'est pas définitive en cas d'accord unanime des associés

Le conjoint d’un associé qui a employé des biens communs pour faire apport à une société peut renoncer tacitement à revendiquer la qualité d’associé. Cette renonciation est définitive, sauf si l’unanimité des associés consent à l’entrée du conjoint dans la société (Cass. com. 19‑6‑2024 n° 22-15.851 FS-B) .

Les circonstances de l'affaire

Un époux commun en biens constitue un groupement agricole d’exploitation en commun (Gaec) avec son fils.

Les statuts de ce groupement stipulent :

  • d’une part, que l’épouse déclare être avertie de l’intention de son époux de faire apport des biens de communauté et qu’elle y consent ;
  • et, d’autre part, qu’elle reconnaît ne pas avoir la qualité d’associé du Gaec et qu’elle ne la requiert pas.

Quelques années plus tard, l’épouse revendique cette qualité, à concurrence de la moitié des parts dépendant de la communauté de biens existant entre elle et son époux, ce que les associés du Gaec acceptent unanimement. Les relations entre les deux époux se dégradant, l'époux assigne le Gaec en annulation des assemblées générales ayant notamment agréé l'épouse en qualité d'associé. La cour d'appel lui donne raison.

La décision de la Cour de cassation

La Cour de cassation juge que, bien que les statuts ne fassent pas mention de l’article 1832-2 du Code civil, l’épouse avait renoncé, clairement et sans réserve, au moment de la constitution du groupement, à revendiquer la qualité d’associé au titre des biens communs apportés par son époux , sans pouvoir revenir ultérieurement sur sa décision.

Toutefois, précise la Cour, la renonciation par l’épouse à sa qualité d’associé lors de l’apport ne fait pas obstacle à ce que l’ unanimité des associés lui reconnaisse ultérieurement, à sa demande, cette même qualité.

  • Dans les sociétés autres que les sociétés par actions (sociétés civiles, SARL, sociétés en nom collectif et sociétés en commandite simple), le conjoint commun en biens d’un associé, qui a employé des biens communs pour faire apport à une société ou pour acquérir des parts sociales, bénéficie d’un droit de revendication de la qualité d’associé pour la moitié des parts souscrites.
  • Pour permettre l’exercice de ce droit, la loi impose que le conjoint soit averti et qu’il soit justifié de cette information dans l’acte d’apport ou d’achat (C. civ. art. 1832-2, al. 1) .
  • Pour exercer son droit de revendication, le conjoint doit notifier à la société son intention d’être personnellement associé (C. civ. art. 1832-2, al. 3) .
  • Le conjoint peut renoncer à revendiquer la qualité d’associé. Cette renonciation peut être tacite, à condition d’être claire et sans réserve (Cass. com. 21‑9‑2022 n° 19-26.203) . Une fois que le conjoint a renoncé à revendiquer la qualité d’associé, il ne peut plus revenir sur sa décision (Cass. com. 12‑1‑1993 n° 90-21.126) .
  • Dans l'arrêt ci-dessus commenté, la Cour de cassation reconnaît, pour la première fois, une exception au caractère définitif de la renonciation lorsque, à la demande du conjoint, les associés acceptent à l’unanimité que le conjoint ait la qualité d’associé. La solution serait-elle identique si l’acceptation des associés avait été donnée, non à l’unanimité, mais à la majorité requise pour agréer un nouvel associé ?
  • Il appartiendra à la Haute Juridiction de préciser sa position.

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