Salariés transférés : droit à un bonus ?
Principe en cas de transfert d’entreprise. Les salariés transférés deviennent ceux de l’entreprise d’accueil et peuvent demander, dès le transfert, le bénéfice des avantages de cette entreprise (C. trav. art. L 1224-1) . Mais pour éviter la suppression brutale de leurs anciens avantages conventionnels, ceux-ci sont maintenus jusqu’à l’entrée en vigueur d’un nouveau statut conventionnel négocié ou, à défaut, pendant une durée d’ 1 an à compter de l’expiration du délai de préavis. À défaut, ils ont droit, à la fin de la période de survie, à une garantie de rémunération : son montant annuel, pour une durée de travail équivalente à celle de leur contrat de travail, ne peut pas être inférieur à la rémunération perçue les 12 derniers mois en application de la convention/accord mis en cause (C. trav. art. L 2261-14) .
À savoir. Avant la création de la garantie de rémunération (loi 2016-1088 du 8‑8‑2016) , les salariés transférés conservaient, à l’issue de ce délai, les avantages individuels qu’ils en avaient acquis. Les juges, sous l’empire de ce texte, avaient précisé que :
- le salarié transféré peut demander le bénéficie d’un accord collectif de l’entreprise d’accueil (Cass. soc. 24‑1‑1996 n° 93-40.745) , qui ne peut le subordonner à sa renonciation à ses droits issus d’un usage/engagement unilatéral en vigueur dans son entreprise d’origine ou au maintien de ses avantages individuels acquis (Cass. soc. 13‑10‑2016 n° 14-25.411) ;
- seules les règles plus favorables de l’accord mis en cause continuent à bénéficier aux salariés transférés (Cass. soc. 6‑12‑2023 n° 23-11.303) ;
- des avantages ayant le même objet ne peuvent pas se cumuler, seul le plus favorable peut être accordé (Cass. ass. plén. 24‑10‑2008 n° 07-42.799) ;
- les salariés du cessionnaire ne peuvent invoquer une différence de traitement par rapport à ceux intégrés, car elle est justifiée par des règles légales s’imposant à l’employeur (Cass. soc. 11‑1‑2012 n° 10-14.614) .
Application à un bonus annuel. L’employeur refuse aux salariés repris au 1‑1‑2014 le bonus 2014 de 12,5 % décidé par engagement unilatéral, et en justice, la cour d’appel ne leur accorde que celui de 5 % prévu dans leur entreprise d’origine. Elle est censurée : le cessionnaire ne peut pas refuser aux salariés accueillis les avantages collectifs instaurés par accord collectif, usage ou engagement unilatéral de l’entreprise d’accueil au motif qu’ils tiennent des droits d’un usage/engagement unilatéral en vigueur dans leur entreprise d’origine lors du transfert, ou ont droit au maintien provisoire de leur ancien statut collectif et à la conservation de leurs avantages individuels acquis (Cass. soc. 22‑5‑2024 n° 22-14.984) .
Conseil. Il est donc probable qu’ils obtiendront le bonus de 12,5 % au lieu de celui de 5 %. Sachez que l’entreprise avait, l’année suivante, pris un nouvel engagement unilatéral de bonus visant cette fois tous les salariés.