BULLETIN DE SALAIRE - MENTIONS - 21.06.2024

Présentation du bulletin : attention à la rémunération !

Modifier la présentation de la rémunération sur le bulletin de paie peut être considéré par les juges comme constituant une modification du contrat de travail nécessitant l’accord du salarié : un exemple.

Rappel du principe

Pour les juges, la durée contractuelle du travail, base de calcul de la rémunération, est un élément du contrat de travail qui ne peut être modifié sans l’accord du salarié (Cass. soc. 31‑3‑1999 n° 97-41.819) . Dès lors qu’elle est expressément prévue au contrat de travail ou contractualisée, la durée du travail ne peut pas être unilatéralement modifiée par l’employeur, qu’il s’agisse de son augmentation ou de sa diminution, et ce, même lorsqu’il n’y a pas d’incidence négative sur la rémunération (Cass. soc. 20‑10‑1998 n° 96-40.614 ; Cass. soc. 30‑3‑2011 n° 09-70.853) .

Sur la présentation du temps de travail

L’affaire. Alors que, pendant 13 ans, le salaire mensuel d’une employée libre-service à temps partiel figurait sur son bulletin pour 130 h de travail, il est séparé en 2 lignes distinctes, l’une correspondant aux heures de travail proprement dites, et l’autre au temps de pause, sans changement du montant de la rémunération. Les juges d’appel déboutent la salariée de sa demande de rappels de salaire, car malgré le changement d’affichage, les temps de pause étant payés au même taux horaire que les heures travaillées, elle était toujours rémunérée pour 130 h de travail.

La solution. Les juges d’appel sont censurés, car en l’absence d’accord de la salariée, l’employeur ne pouvait pas modifier unilatéralement la présentation du bulletin de paie, peu important la rémunération conventionnelle du temps de pause au même taux horaire que le temps de travail. Pour rappel :

  • l’acceptation par le salarié d’une modification de son contrat de travail ne peut pas se déduire de la seule poursuite du travail aux nouvelles conditions, ni de la remise de bulletins de paie non contestés (Cass. soc. 5‑10‑1993 n° 90-41.358 ; Cass. soc. 30‑9‑2003 n° 01-43.232)  ;
  • l’acceptation par le salarié de la modification de la durée contractuelle du travail ne peut en effet résulter que d’une manifestation claire et non équivoque de sa volonté (Cass. soc. 16‑2‑1999 n° 96-45.594 ; Cass. soc. 8‑7‑2015 n° 14-12.305)  ;
  • et il en va donc de même de la seule modification de l’affichage de la durée du travail sur le bulletin de paie du salarié (Cass. soc. 13‑3‑2024 n° 22-22.032) .

À savoir. La chambre sociale se prononce au visa des articles L 1221-1 du Code du travail et 1134 du Code civil (devenu 1103) relatifs au consentement des parties contractantes et à la bonne foi contractuelle.

Et sur la question des temps de pause

Cet arrêt amène à s’interroger sur la rémunération des temps de pause et leur inclusion dans le salaire de base, même si elle n’est pas directement traitée dans cette affaire.

La jurisprudence a eu à plusieurs reprises l’occasion de se prononcer dans des affaires où, à l’inverse, la ligne « temps de pause » était supprimée du bulletin de paie ou n’était pas distinguée de la ligne « heures travaillées », la question étant alors de savoir si le salaire de base avait continué à intégrer la rémunération conventionnelle au titre des temps de pause et si ces derniers avaient ou non été payés. Tout dépend alors des dispositions conventionnelles applicables, certaines CC assimilant le temps de pause à du travail effectif, d’autres non.

II a par exemple été jugé, dans le cadre de la CCN de la plasturgie du 1‑7‑1960 :

  • que la rémunération des temps de pause non assimilés à du temps de travail effectif devait faire l’objet d’une mention distincte sur le bulletin de paie (Cass. soc. 1‑12‑2016 n° 15-18.109)  ;
  • étant précisé qu’une présentation erronée des bulletins de paie ne signifie pas nécessairement que ces temps de pause n’ont pas été payés (Cass. soc. 28‑3‑2018 n° 16-23.831) .
En ces périodes de modifications réglementaires régulières de la présentation du bulletin de paie, il ne faut pas oublier que son contenu – et particulièrement la composition de la rémunération du salarié – est le reflet de sa situation contractuelle. Et la rémunération prévue à son contrat ou à un avenant ne pouvant pas être modifiée sans son accord, il en découle que son affichage sur le bulletin ne peut pas l’être non plus.

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